Les oeuvres chambristes de Boccherini jouissent d’un potentiel de séduction mélodique toujours flatteur pour ses interprètes. Mais les meilleurs, comme l’ Accademia Ottoboni, voient bien au-delà…et contournent ainsi les attraits convenus d’une musique d’ambiance. Le goût pour l’effet brillant, pour la posture rythmique outrancière ne menace pas moins le fragile équilibre. Et la connivence des partenaires est sans doute l’ingrédient le plus nécessaire. Marco Ceccato l’a bien compris. Ses Ottoboni (dont Amandine Beyer, au premier violon) se connaissent par coeur. Même un Bylsma n’eut pas la chance, pour ses deux gravures du Concerto pour violoncelle n. 7, de partager un tel degré d’ intimité avec ses complices du Concerto Amsterdam en 1965 (inaltérable joyau), puis avec Tafelmusik en 1989, L’ ensemble Pulcinella d’ Ophélie Gaillard offre peut-être, dans le Concerto G480, par la proximité des archets, la conception la plus en phase avec celle de l’ Accademia Ottoboni. Au jeu sage, modérément expressif, de Pulcinella répond la sensualité des coéquipiers de Marco Ceccato, qui ajustent mille détails de textures et de couleurs tout en gardant un ton simple, fraternel. Ce Boccherini fantasque et tendre nous émerveille. Savourez la communion du violoncelle et du violon dans les solos du premier Allegro, cette élégance d’archet, où les envolées sur la chanterelle suggèrent la ligne évanescente sans vraiment la dessiner. Aux antipodes de Bylsma…mais à son côté au sommet.
L’ éclatement spatial de la prise de son sert le Quintet G451, où la guitare de Francesco Romano, bien centrée, commente et arbitre le discours pathétique des archets. Onctueux et aéré, le Divertimento G 463 chante joyeusement.
Et quelle flûte! Volubile mais bien articulée, quasi sans vibrato mais très expressive – Manuel Granatiero suggère l’ indicible avec naturel.
Des magiciens, pour un voyage en quatre étapes dans l’ imaginaire sonore et poétique de Boccherini.
Roger-Claude Travers